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INTERVIEW DE LA CHEFFE ANTO COCAGNE, ILLUSTRE AMBASSADRICE DES CUISINES D’AFRIQUE

Dernière mise à jour : 23 oct. 2020

Pour rappel, cette rubrique « Gastronomie africaine » a vu le jour en mars 2020 et a pour vocation de faire connaître au plus grand nombre les recettes venues des différents pays du continent africain, ainsi que leur histoire.

 

Cheffe Anto, on ne vous présente plus. Originaire du Gabon, vous êtes une cheffe de renommée au style culinaire unique, qui propose une cuisine africaine hors des sentiers battus et brise les aprioris sur des plats encore trop peu connus.


1. Pouvez-vous nous présenter votre parcours ? Au départ je ne savais pas que j’étais passionnée par la cuisine. Dans la culture africaine, savoir cuisiner est tout simplement normal pour une jeune fille. Je sais que très jeune, j’aimais regarder ma grand-mère cuisiner, je me souviens encore des grands repas de famille, des mariages coutumiers de mes cousines, de ces moments où toutes les filles étaient réquisitionnées pour aider en cuisine. Pour moi, tout cela était juste normal, jusqu’au moment de choisir une orientation de carrière. Faire de la cuisine mon métier devenait une évidence. Pour mes parents ingénieurs de profession, et anciens hauts cadres, ce n’était pas un métier très valorisant. J’ai tenu ferme, pour moi c’était la cuisine ou rien. J’ai choisi ce métier par passion. Il n’y a pas de place pour la monotonie. J’ai un bac général en Sciences éco obtenu à Libreville au Gabon. Après cela je me suis inscrite en lettres moderne à l’Université Omar Bongo, car mon père ne voulait pas entendre parler de cuisine. Heureusement pour moi cette année fut déclarée blanche et après avoir réussi à convaincre mes parents, ces derniers ont finalement accepté de me laisser venir en France pour faire des études d’hôtellerie restauration. Venant d’un cursus général, j’ai dû faire une mise à niveau pour apprendre en 1 an, ce que les autres apprennent en enseignement technique de la 3ème à la terminale. Puis j’ai intégré l’Ecole Hôtelière Lesdiguières à Grenoble où j’ai préparé un BTS option arts culinaires, de la table et du service. Après mon BTS, j’ai fait une licence en alternance en Direction des unités de restauration, et comme j’étais passionnée par la restauration évènementielle, je suis venue à Paris pour intégrer l’Ecole supérieure de Cuisine Française Grégoire Ferrandi, où j’ai préparé un Bachelor restaurateur option Traiteur Organisateur de Réceptions. J’ai fait de nombreux stages en France et aux USA dans des établissements de renom. A mon retour des US, j’ai travaillé 7 ans, et depuis bientôt cinq ans, je me suis mise à mon propre compte comme chef à domicile et traiteur.

2. Comment décrirez-vous votre style de cuisine et comment se distingue-t-il des autres ? Ma cuisine est panafricaine, elle puise son énergie dans les classiques de nos cuisines africaines, puis les revisite et les présente de façon moderne, tout en conservant l’authenticité de nos saveurs.


3. Où puisez-vous votre inspiration ? Ma source d’inspiration est d’abord divine. Aussi loin que je m’en souvienne, je n’ai jamais été aussi bien inspirée qu’après avoir passé du temps à me connecter au divin. Ensuite, je m’inspire beaucoup de mes souvenirs d’enfance, des plats de ma grand-mère, de ma mère, de mes tantes. Enfin, je puise mon inspiration dans mes expériences, mes rencontres, mes découvertes avec d’autres chefs. 4. Quels ingrédients/produits de la cuisine africaine aimez-vous particulièrement travailler ? Je cuisine de tout. J’aime particulièrement cuisiner le manioc, que je trouve exceptionnel comme produit. On peut tout faire avec en cuisine comme en pâtisserie, cuit au four, sauté ou mijoté, il s’adapte à toutes les cuissons.

5. Quel état des lieux pouvez-vous nous faire de la gastronomie africaine ?   Je dirais plutôt : les gastronomies d’Afrique, car notre continent regroupe 54 pays répartis en 5 grandes régions. Notre patrimoine culinaire n’a rien à envier aux autres. Pour le moment nos gastronomies, sont peu connues, pas populaires et souffrent de beaucoup de préjugés. Dans un avenir certain, ce ne sera plus le cas, parce que différents acteurs dont je fais partie, travaillent à populariser nos cuisines et à briser les barrières qui nous éloignent des autres cultures.

6. Quel chef(fe) vous inspire ? En termes de d’accomplissement : Rougui Dia, car elle ne s’est jamais dit qu’être une femme noire était incompatible avec le métier de chef de cuisine En termes de business : Cyril Lignac, car il a démontré que la cuisine ne se résumait pas à avoir un restaurant et écrire des livres de recettes En termes d’expansion : Paul Bocuse, car il a réussi à faire connaitre la gastronomie française au-delà de l’hexagone, et à créer des écoles de cuisine internationales.

7. Quelles sont selon vous les qualités requises pour être un bon cuisinier ? Pour moi un bon cuisinier doit avoir le goût du service, être dynamique, créatif, débrouillard, savoir se remettre en question. C’est quelqu’un qui s’intéresse aux produits et aux clients.

8. Que faites-vous quand vous n’êtes pas aux fourneaux ? Quand je ne suis pas aux fourneaux, je fais du blogging en faisant des vidéos pour ma chaine Youtube, en écrivant des articles pour le magazine Afrocooking, et j’organise des évènements pour la promotion de nos cuisines via le Festival We Eat Africa.

9. Pour finir, quelle recette souhaitez-vous partager avec nous ? Je souhaiterai partager la recette de la crème brûlée baobab.


Ingrédients pour 6 personnes : 50 cl de crème fraîche liquide entière 50 g de sucre 6 jaunes d'œufs 6 CS sucre cassonade 1 CS poudre de baobab 1 gousse de vanille Préparation : Préchauffer le four à 120°C – Thermostat 4. Couper la gousse de vanille en deux dans le sens de la longueur. Gratter l’intérieur pour extraire les graines. Faire chauffer la crème à feu doux avec les gousses et laisser infuser pendant 5 mn. Battre énergiquement les jaunes, le sucre et les graines de vanille pour obtenir un mélange mousseux. Enlever les gousses de la crème et la verser progressivement sur le mélange de jaunes et sucre. Mélanger. Ajouter la poudre de baobab. Mélanger à nouveau. Mettre la crème dans des ramequins. Enfourner au bain marie 30 à 35 minutes : la crème doit trembloter comme un flan. Sortir du four. Laisser refroidir à température ambiante pendant 1 heure. Puis, mettre les crèmes au réfrigérateur pendant 4 heures minimum. Avant de servir, verser une couche de sucre cassonade sur le dessus, caraméliser le sucre à l’aide d’un chalumeau.

Le baobab produit un fruit appelé pain de singe, qui est réduit en poudre après séparation de la chair des graines. Elle est facile à obtenir car le fruit contient peu d'humidité. On trouve cette poudre dans les magasins bio. Le baobab est un super aliment 100% africain, dont le goût laiteux et légèrement acidulé s’allie très bien avec les desserts à base de lait. La poudre de baobab est riche en calcium en vitamine C et en fer.

Chef Anto, merci d’avoir répondu à nos questions et partagé votre passion pour la cuisine. Votre recette de crème brûlée baobab donne très envie et je suis certaine que nous serons nombreux à essayer de la reproduire chez nous. Vous aussi, n’hésitez pas à aller sur notre Forum de discussion pour partager avec nous vos feedbacks sur cette recette, ainsi que vos petits astuces et secrets pour la personnaliser. Ne l’oublions jamais, la cuisine retisse les liens et a ce singulier pouvoir de nous rassembler par-delà nos différences, autour du plaisir originel et universel des arts de la table. 


Par Carole Sagbo - Le 17/09/2020

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